5 novembre 2019 - Kamakura, et zen tu seras

Publié le par Baudouin

Levés de bonne heure et, comme toujours, de bonne humeur, ce matin. Cela fait aujourd'hui sept jours que nous avons posé le pied au Japon et la météo est toujours avec nous ! Quand nous connaissons ce que les Japonais ont subi les semaines précédant notre arrivée, nous devons nous estimer chanceux !

Levés de bonne heure parce que le programme est plutôt chargé aujourd'hui, avec rien moins que quatre temples et un sanctuaire à visiter !

Dans mon article précédent, j'avais écrit que Fujisawa était idéalement situé, au carrefour de différentes lignes de chemin de fer. En fait, pour aller à Enoshima et à la gare principale de Kamakura, il est possible d'y aller par la même ligne, soit la ligne Enoden. C'est le plus simple puisqu'il ne faut pas changer de train, mais pas le plus rapide. Le Pass Hakone Kamakura que nous avons acheté chez Odakyu dimanche dernier est valable sur cette ligne.

L'autre solution, c'est de reprendre la ligne Tokaido en direction de Tokyo jusque la gare d'Ofuna. Et de là, prendre un train pour Kamakura. Même en tenant compte de la correspondance, c'est presqu'exactement deux fois plus rapide ! Quinze minutes dans ce cas au lieu de trente-trois. Ici, le JR Pass est valable.

Cette dernière solution s'impose aussi à nous puisque nous devons descendre à la gare de Kita-Kamakura située juste devant l'entrée du temple Engaku-ji, objet de notre première visite du jour. Or, la gare de Kita-Kamakura n'est pas desservie par la ligne Enoden et, de toute façon, notre Pass Odyaku ne sera validé que demain.

Localisation de Kamakura

En avant donc pour la gare JR de Fujisawa, à peine cinq minutes à pied de notre hôtel. Alors que nous y empruntons le hall au-dessus des voies, chérie regarde machinalement par la fenêtre - la curiosité féminine ? -  et s'exclame : "le mont Fuji !". En effet, même si la vue n'est sûrement pas la plus belle que nous pourrons en avoir, nous voyons enfin, pour la première fois, et avec émotion, cette montagne si emblématique du Japon !

La première fois que nous apercevons le mont Fuji !

La première fois que nous apercevons le mont Fuji !

Le temple Engaku-ji

Au bout de quinze minutes de trajet en train, nous arrivons donc à l'arrêt Kita-Kamakura situé effectivement juste en face de l'entrée du temple Engaku-ji. En réalité, nous entrons ici sur un domaine composé de dix-huit temples !

L'histoire de ce temple commence en 1282, lorsqu'il fut fondé par le moine zen chinois Mukagu Sogen à la demande du régent Hojo Tokimune (notez qu'en japonais traditionnel, le nom de famille s'écrit en premier. Hojo est donc ici le nom de famille). A l'époque maître du zen au Japon mais aussi gouverneur militaire de Kamakura, ce dernier venait de repousser l'invasion mongole qui avait commencé en 1274 et voulut édifier ce temple en hommage aux morts des deux côtés. Il souhaita aussi en faire un centre à partir duquel l'influence du zen pourrait se propager. Ainsi, si le temple Engaku-ji est le deuxième des cinq grands temples de Kamakura, il est aussi l'un des plus importants complexes zen au Japon.

Selon des écrits d'époque, son nom viendrait du soutra de l'Eveil parfait (Engaku-kyo). Au cours des siècles, il eut à subir plusieurs incendies ayant pour conséquence qu'il n'apparaît plus aujourd'hui tel qu'à l'origine. Sa forme actuelle nous vient ainsi de la fin de l'époque d'Edo (1603-1868) lorsqu'il fut reconstruit par le prêtre zen Seisetsu.

Par la suite, il devient le centre principal d'enseignement du zen dans la région. A l'heure actuelle, on y enseigne toujours le zazen, la méditation assise inspirée de la posture du Bouddha assis.

Les temples furent construits sur le flanc d'une colline boisée dans un style chinois austère. Mais dans cet écrin de verdure, le domaine propose au visiteur une promenade très plaisante. Zen, en fait... Ah bon ? Comme c'est étrange...

On y va ?

Bien sûr, nous pénétrons dans le temple par le "sanmon", la porte principale datant de 1785. On admire le travail minutieux des charpentiers et autres menuisiers...

Le "sanmon", ou entrée principale à un étage
Le "sanmon", ou entrée principale à un étageLe "sanmon", ou entrée principale à un étage
Le "sanmon", ou entrée principale à un étage

Le "sanmon", ou entrée principale à un étage

La visite continue par le "butsuden", bâtiment principal qui fut reconstruit en 1964 après avoir été détruit par le tremblement de terre de 1923. On peut y admirer une statue en bois de Shaka Buddha, principal objet de culte du temple. Mais qui est Shaka Buddha ? C'est en fait le Bouddha des origines, celui né au Népal au VIè siècle avant JC (à ne pas confondre avec JCVD !) sous le nom de Shaka Nyorai. Quand le bouddhisme arriva au Japon au VIè et VIIè siècle après JC, les Japonais, eux, l'appelèrent Shaka Buddha.

On y admirera aussi le superbe dragon dessiné au plafond...

Le "butsuden", bâtiment principal
Le "butsuden", bâtiment principalLe "butsuden", bâtiment principal
Le "butsuden", bâtiment principal

Le "butsuden", bâtiment principal

Nous arrivons ensuite au "Daihojo". A l'origine, il s'agissait de la demeure du Maître du temple mais il a aujourd'hui diverses fonctions : cérémonies religieuses, séances de méditation, sermons, séminaires d'été et autres classes. Nous avons la chance de pouvoir le visiter, il n'est pas toujours ouvert au public.

Le "daihojo", ancienne demeure du MaîtreLe "daihojo", ancienne demeure du Maître
Le "daihojo", ancienne demeure du MaîtreLe "daihojo", ancienne demeure du Maître
Le "daihojo", ancienne demeure du MaîtreLe "daihojo", ancienne demeure du Maître

Le "daihojo", ancienne demeure du Maître

Presqu'au bout de la propriété, nous trouvons encore le "kaikibyo", un mausolée dédié au fondateur du temple, Hojo Tokimune.

Lui faisant face, nous ne pourrons malheureusement pas voir le "shariden", celui-ci n'étant accessible au public qu'à de rares dates. Cet édifice sacré abrite une dent de Bouddha offerte par le temple chinois Nengren à la demande du shogun Minamoto no Sanetomo.

Ce dernier fut le troisième shogun du shogunat de Kamakura mais, victime de luttes intestines au sein même de sa famille, il ne put vraiment régner. Pour tromper l'ennui, il se mit à l'écriture de poèmes, ce qui en fit sa réputation. Mais il tomba dans l'alcoolisme avant de finir assassiné le 13 février 1219 à même pas vingt-sept ans ! Etait-ce un vendredi ?

Quant au temple Nengren, il est un des plus fameux temples bouddhistes chinois, situé dans la province de Jiangxi, en Chine donc. Reconstruit par la dynastie Tang à la fin du VIIIè siècle, il a inspiré le "shariden" qui en est devenu un magnifique exemple. Au point qu'il a été classé trésor national par le gouvernement japonais. Hélas, nous n'en avons pas de photo personnelle à partager avec vous. Mais Google est votre ami, non ?

Le "kaikibyo", mausolée dédié à Hojo Tokimune

Le "kaikibyo", mausolée dédié à Hojo Tokimune

Nous déambulons ensuite vers la sortie, l'occasion de vous offrir encore quelques photos d'ambiance...

Quelques photos diverses
Quelques photos diversesQuelques photos diversesQuelques photos diverses
Quelques photos diversesQuelques photos diversesQuelques photos diverses
Quelques photos diversesQuelques photos diversesQuelques photos diverses

Quelques photos diverses

Il nous reste une obligation avant de quitter le temple. Monter une belle volée d'escaliers pour accéder à "l'ogane" et au "bentendo".

"L'ogane" est une grande cloche fondue en 1301 à la demande de Hojo Sadatoki, fils de Hojo Tokimune et devenu neuvième régent du shogunat de Kamakura en 1285 à l'âge de quatorze ans ! A notre époque, on dirait que c'était un vilain garçon. En effet, alors qu'il venait juste d'être désigné régent, il ordonna le massacre du clan Adachi pourtant allié de la famille ! Cinq cents morts, pas moins !

Il faut croire qu'il fut quand même pris de remords puisqu'il entra dans les ordres en 1301 et se retira sur l'île d'Enoshima afin d'y prier pour la paix et l'harmonie dans le monde. Bon, certaines rumeurs disent qu'il continua quand même à diriger le Japon jusqu'en 1311. Fourbe, vous avez dit ?

Le "bentendo", lui, est un petit édifice dédié à la déesse Benzaiten, une divinité bouddhiste japonaise et hindoue du savoir, de l'art et de la beauté, de l'éloquence, de la musique, de la littérature, des arts et des sciences, de la vertu et de la sagesse, de la prospérité et de la longévité ! Visiblement, ils ne connaissaient pas le décumul, à l'époque ! Elle est la seule déesse à faire partie des Sept Divinités du Bonheur mais est aussi considérée comme une des divinités guerrières les plus puissantes ! Il n'y a pas contradiction, là ?

On en oublierait presque que l'endroit nous offre une "petite" vue sur le mont Fuji !

Ogane, bentendo et mont Fuji
Ogane, bentendo et mont FujiOgane, bentendo et mont Fuji

Ogane, bentendo et mont Fuji

Nous quittons donc le temple Engaku-ji pour nous rendre à pied au temple Kencho-ji. Au départ, le chemin longe la ligne de chemin de fer, ce qui me permet de prendre au vol une petite vidéo d'un train JR passant à notre hauteur.

J'en profite pour faire une petite digression. Vous verrez peut-être des voitures à deux étages dans la composition du train. Au Japon, ces voitures sont généralement réservées à la classe "Green", l'équivalent de notre 1ère classe. Ainsi parle-t-on de "Green Car" pour les désigner. Pour enlever tout doute éventuel, un trèfle vert à quatre feuilles est affiché en grand à côté de chaque accès à la voiture. Ces voitures ne sont pas accessibles avec le JR Pass normal.

Si vous n'avez pas vu le fameux trèfle sur la vidéo, je vous offre ci-dessous un extrait photo. Gentil, non ?

Le trèfle vert indique une "Green Car"

Le trèfle vert indique une "Green Car"

Un peu plus loin, nous découvrons une maison hébergeant une Française qui y expose des bannières faites de vieux kimonos récupérés. Si nous avons déjà eu l'occasion de constater l'attrait des Japonais pour la France, il ne nous était jamais arrivé de voir une Française installée ici.

Une Française réalise des bannières au départ de kimonos récupérés

Une Française réalise des bannières au départ de kimonos récupérés

Au passage à niveau, ce sont des lanternes qui servent de feux de signalisation. Ce n'est pas la première fois que nous sommes témoins du contraste entre modernité et archaïsme au Japon.

Des lanternes comme feux de signalisation

Des lanternes comme feux de signalisation

Le temple Kencho-ji

Au bout d'un petit quart d'heure, nous arrivons au temple Kencho-ji. Il est le premier des cinq grands temples zen de Kamakura et le plus ancien des monastères enseignant le zen au Japon. La logique historique aurait donc voulu qu'on le visite avant l'Engaku-ji mais cela nous aurait imposé des allers-retours chronophages. Il faudra donc faire preuve d'un peu de souplesse intellectuelle pour bien comprendre.

Le temple Kencho-ji fut construit sur ordre de l'empereur Gofukakusa pendant la régence de Hojo Tokiyori, père de Hojo Tokimune. La construction commença en 1249, pour se terminer en 1253 soit dans la cinquième année de l'ère Kencho. C'est donc de là qu'il tire son nom.

Pour la petite histoire, la mère de Hojo Tokiyori était une Adachi, soit issue du clan qui fut exterminé en 1285 par son arrière-petit-fils, Hojo Sadatoki !

Hojo Tokiyori est reconnu pour les multiples réformes qu'il a engagées lorsqu'il était au pouvoir, de 1246 à 1256. Il se dit qu'il avait pour habitude de voyager incognito pour observer de lui-même les conditions de vie de ses concitoyens pour les améliorer. Il aurait aussi envoyé des samouraï découvrir les secrets des aciers nordiques.

Mais ses méthodes pouvaient aussi apparaître comme tyranniques. Peu après son intronisation, il eut à subir une tentative de coup d'état, qu'il réprima. L'année suivante, il fit exterminer le clan Miura. Pris de remords suite aux nombreuses personnes qu'il avait tuées et hanté par des esprits vengeurs, il entra dans les ordres en 1256, devint prêtre bouddhiste et se convertit au zen. Bien qu'alors sans fonction officielle, il continua néanmoins à gouverner le Japon. Il décéda en 1263.

Et si nous allions maintenant visiter ce fameux temple Kencho-ji ?

Ici, nous entrons par le "somon", l'entrée générale. A l'origine, cette porte se trouvait dans un temple de Kyoto, où elle servait de lieu d'entreposage pour les tablettes de la famille impériale.

Le "somon"

Le "somon"

Après avoir pris nos billets au "Ticket office", et alors que nous nous dirigeons vers le "Sanmon", l'entré principale, nous sommes interpelés par des écoliers. En cette période de l'année, les écoles organisent des visites de temples pour les élèves. Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que nous en croisons et que nous répondons aux questions qu'ils doivent nous poser dans le cadre du cours d'anglais. Invariablement, elles tournent sur un sujet : la paix ! Et tout aussi invariablement, ils sont bien incapables de les poser sans les lire comme il est vain de vouloir établir un dialogue avec eux. Ils ne comprennent rien ! Mais bon, nous nous prêtons au jeu avec plaisir et nous recevons de petits origami en récompense.

Des écoliers nous demandent notre avis sur la paix

Des écoliers nous demandent notre avis sur la paix

Notre devoir accompli, nous rejoignons donc le "sanmon" qui nous paraît imposant ! La porte actuelle fut construite en 1754 par Bansetsu, le prêtre en chef de l'époque. Il reçut pour cela des donations des habitants de la région. Mais la légende dit qu'il fut aidé dans sa collecte par un blaireau - tanuki en japonais - qui se serait transformé en moine en récompense de la gentillesse dont les prêtres du Kencho-ji faisaient preuve à son égard ! (Je rêve que mon chat fasse aussi une petite collecte pour moi mais je ne me fais pas trop d'illusions !) Pour cette raison, la porte est aussi appelée "Tanuki mon", soit la "porte du blaireau".

A droite de la porte se trouve le "bonsho" (temple de la cloche). La cloche fut fondue en 1255 et porte en inscription le nom de son fondeur, Rankei Doryu. Elle a été classée trésor national par le gouvernement japonais.

Le "sanmon" et le "bonsho"
Le "sanmon" et le "bonsho"Le "sanmon" et le "bonsho"

Le "sanmon" et le "bonsho"

Le bâtiment suivant est le "butsuden". Les arbres que l'on peut voir devant sont des genévriers dont les graines furent importées de Chine voici plus de 750 ans. Ne vous aventurez pas à aller y graver un cœur ou autre, ils ont été classés trésors naturels ! Si vous hésitez encore à le faire, demandez à Carlos ce qu'il pense des prisons japonaises...

Le "butsuden" était à l'origine un mausolée appartenant au Shogunat et se trouvait dans le temple Zojo-ji à Tokyo. En 1647, il fut déplacé jusqu'ici pièce par pièce.

Le "butsuden"
Le "butsuden"Le "butsuden"Le "butsuden"

Le "butsuden"

La grande statue de Bouddha visible à l'intérieur du "butsuden" est une représentation de Jizo Bosatsu, en réalité un Bodhisattva. Mais qu'est-ce donc ? Un Bodhisattva est un être qui a fait vœu de devenir Bouddha, mais refuse d'atteindre le nirvana tant que tous les êtres n'auront pas été sauvés.

Jizo Bosatsu est très populaire au Japon. Il est le protecteur des enfants (vivants ou morts), des femmes enceintes, des pompiers, et des voyageurs. C'est ainsi qu'on le voit souvent en forme de borne le long des routes. Dans le folklore japonais, on le représente aussi avec des enfants cachés sous sa robe pour les protéger des démons et les guider vers le salut.

Jizo Bosatsu

Jizo Bosatsu

Juste derrière, nous découvrons le "hatto". Ce bâtiment, datant de 1814, héberge toutes les principales cérémonies publiques. Il est la plus grande structure bouddhiste en bois de l'est du Japon. Le plafond est couvert d'une peinture représentant un "Unryu-zu", soit un "dragon des nuages". Elle fut réalisée pour célébrer les 750 ans du temple.

Le "hatto"
Le "hatto"Le "hatto"

Le "hatto"

Un peu plus loin se dresse un mur d'enceinte dont l'accès est protégé par la porte chinoise, ou "karamon". A l'instar du "butsuden", elle fut déménagée de Tokyo en 1647.

Derrière le mur se trouve le "hojo", soit le bâtiment principal. C'était autrefois la résidence du chef des prêtres mais aujourd'hui il accueille les services religieux. Comme le "somon", il fut transféré de Kyoto. Photos interdites à l'intérieur.

A l'arrière, nous pouvons voir le grand jardin et son étang.

Le "karamon" et le "hojo"
Le "karamon" et le "hojo"Le "karamon" et le "hojo"
Le "karamon" et le "hojo"

Le "karamon" et le "hojo"

La visite ne se termine pas ici. Disons même que c'est seulement maintenant qu'elle risque de marquer les esprits !

Au départ, la petite route asphaltée qui longe le jardin du "hojo" s'élève doucement et progressivement. On arrive ensuite à un petit escalier de trois ou quatre marches gardé par deux petits lions de pierre. En jetant un oeil plus avant, on commence à comprendre ce qui nous attend. Là, tout au fond de l'allée dallée, la colline s'élève brutalement, comme un mur se dressant devant nous ! Un mur ? Que dis-je !? Une falaise !

Après, on ne compte pas les marches, tant il y en a ! Pour le moral, vaut mieux pas, d'ailleurs ! Bon, heureusement, on a de quoi se distraire un peu.

Au bout d'un quart d'heure - vingt minutes d'ascension, nous arrivons au "hanso-bo", un petit sanctuaire dédié à la protection du temple Kencho-ji. Originellement, il se trouvait au temple Hoko-ji à Shizuoka mais fut déplacé ici en 1890 sur ordre du Maître zen Ozora Kando.

 

Le chemin vers le "hanso-bo"Le chemin vers le "hanso-bo"
Le chemin vers le "hanso-bo"Le chemin vers le "hanso-bo"
Le chemin vers le "hanso-bo"Le chemin vers le "hanso-bo"
Le chemin vers le "hanso-bo"Le chemin vers le "hanso-bo"

Le chemin vers le "hanso-bo"

Alors que nous nous apprêtons à redescendre, la tenancière du salon de thé adjacent au sanctuaire nous fait signe et nous montre la sortie située à proximité. Dans un anglais presque parfait elle nous recommande de continuer à monter pour rejoindre le sommet de la colline ! "Encore monter !?". "Oui, mais là au-dessus se trouve un observatoire d'où vous pouvez admirer le mont Fuji !". Ah... Dans ce cas...

Nous reprenons donc notre ascension par un escalier irrégulier faisant d'ailleurs partie d'un sentier de randonnée qui traverse le domaine du temple Kencho-ji. Au sommet, en guise d'observatoire il y a juste une plateforme en terre à partir de laquelle il est d'ailleurs bien difficile d'apercevoir le mont Fuji à cause de la végétation qui a envahi les alentours. Avec un peu de gymnastique, nous finissons quand même par le capturer en photo ! Le voyez-vous ?

De l'observatoire, on peut également voir les toits du temple dans la vallée et, plus loin, la baie de Sagami qui baigne Kamakura.

L'observatoireL'observatoireL'observatoire

L'observatoire

Bon, l'effort en valait quand même la chandelle et ce temple Kencho-ji vaut vraiment d'être visité. Mais tout cela nous a creusé l'appétit. Il est midi passé et donc l'heure de trouver un petit resto pour se sustenter...

Nous allons toutefois "subir" un petit contretemps. Au moment où nous prenons des boissons au distributeur situé près de l'entrée, nous faisons connaissance avec un sympathique couple d'Américains dont l'un des deux est d'origine japonaise. La conversation s'engage et, de fil en aiguille, nous apprenons que le grand-père de ce dernier avait été enrôlé dans l'armée américaine durant la seconde guerre mondiale.

Personnellement, je savais que de nombreux Japonais vivant sur le sol américain à cette époque avaient été internés dans des camps mais je n'avais jamais eu vent de l'existence de GI's d'origine japonaise ! Plus surprenant pour moi encore, c'est le fait qu'ils aient été regroupés dans des unités composées uniquement de Japonais, à l'exception des officiers.

Eh bien, si, son grand-père a fait partie du 100th Infantry Battalion et a participé à la campagne d'Italie dont la fameuse bataille de Monte Cassino en 1943 ! Je ne vais pas refaire ici toute l'Histoire mais sachez encore que les Japonais se distinguèrent particulièrement et nombreux furent décorés. Au total, près de 13.000 Japonais ont combattu aux côtés des Américains pendant la seconde guerre mondiale.

Ceux qui sont intéressés par le sujet trouveront ci-dessous un lien vers un site (en anglais) bien documenté.

Le sanctuaire Tsurugaoka Hachiman-gu

Une dizaine de minutes après avoir quitté à pied le Kencho-ji, nous faisons une escale gastronomique au restaurant Satonoudon situé en face d'une entrée secondaire du sanctuaire Tsurugaoka Hachimangu, sur la route principale menant au centre de Kamakura.

Le bâtiment ne paie pas de mine, ressemblant plutôt à une cantine, limite garage. Mais l'affluence nous laisse penser qu'on doit bien y manger. Ce que semble par ailleurs nous confirmer une banderole vantant une recette de udon qui aurait remporté un prix lors d'un concours gastronomique au Japon. Alors, pourquoi ne pas se laisser tenter ?

Pendant que nous patientons sur nos chaises dans la zone d'attente, après nous être inscrits sur une liste, la seule question qui nous taraude vraiment est : va-t-on nous proposer une table normale ou une table japonaise ? Parce que s'asseoir par terre, les genoux repliés sous la table, ça, pour nous, ce n'est tout simplement pas possible !

Finalement, ouf, quand vient notre tour, nous nous voyons proposer une table normale ! Nous prenons donc le fameux udon, qui se révèlera excellent. Good choice !

 

Le udon, spécialité du restaurant Satonoudon

Le udon, spécialité du restaurant Satonoudon

Il est passé 14 heures quand nous quittons le restaurant, et nous n'en sommes pas encore à la moitié de notre programme ! Nous nous dirigeons donc sans tarder vers l'entrée secondaire du sanctuaire Tsurugaoka Hachiman-gu où nous sommes accueillis par un petit torii rouge orangé.

Le torii de l'entrée secondaire

Le torii de l'entrée secondaire

Le sanctuaire Tsurugaoka Hachiman-gu fut édifié en 1063. Contrairement aux deux temples bouddhiques que nous venons de visiter, ce sanctuaire est de rite shinto. Il est dédié à Hachiman Daimyojin, dieu shinto de la guerre et protecteur divin du Japon et du peuple japonais.

La construction du sanctuaire fut décidée par Minamoto no Yoriyoshi au retour d'une victoire de son clan contre une rébellion dans le nord-est du Japon en 1051 pour remercier Hachiman de lui avoir accordé la victoire.

Mais le sanctuaire que nous voyons aujourd'hui ne ressemble plus à l'originel qui était plus petit, moins somptueux et pas au même endroit non plus, d'ailleurs. En effet, celui-ci est dû à un descendant de Minamoto no Yoriyoshi, Minamoto no Yoritomo. Ce dernier est venu s'installer à Kamakura en 1180 pour se révolter contre le clan Taira qui dominait le Japon depuis 1160. A l'époque, le pouvoir était basé à Kyoto.

Le clan Minamoto obtint la victoire et déplaça le centre du pouvoir de Kyoto à Kamakura. Par la même occasion, celui-ci passa pour la première fois entre les mains des samouraï alors qu'il était auparavant exercé par les nobles. Yoritomo peut ainsi être vu comme le fondateur du Shogunat qui perdura pendant 675 ans.

Alors que Yoritomo développait Kamakura en tant que capitale du Japon, le sanctuaire n'en acquit que plus d'importance encore. Il était non seulement une autorité religieuse reconnue mais était aussi considéré comme le centre politique du royaume. Même après que le pouvoir eut quitté Kamakura en 1333, plusieurs shogun démontrèrent le même attachement au sanctuaire Tsurugaoka Hachiman-gu.

Pour la visite, c'est par ici... (attention, nous le visitons dans le sens inverse, c'est-à-dire que nous commençons par le bâtiment principal pour terminer par l'entrée)

Après être passés sous le torii et avoir gravi l'escalier, nous arrivons au pavillon principal, le "Hongu". Composé de trois halls reliés entre eux, il fut reconstruit en 1828 après qu'un incendie le détruisit en 1821. Il est un exemple typique de l'architecture de style Edo (1603-1867) et est pour cela classé "propriété nationale culturelle importante".

Bon, je ne sais pas si c'est parce que nous sommes en pleine digestion, ou si c'est parce que nous ne sommes pas émus, mais nous décidons de ne pas visiter l'intérieur. Nous descendons donc le grand escalier qui fait face au pavillon pour aboutir sur une esplanade où se trouvent différents petits bâtiments.

Le "Hongu", pavillon principal
Le "Hongu", pavillon principalLe "Hongu", pavillon principal

Le "Hongu", pavillon principal

En bas de l'escalier, à droite en venant du "Hongu", notre attention est attirée par un mur de barils de saké tel que nous en avions vu un à Tokyo sur le chemin du sanctuaire Meiji Jingu. En fait, il s'agit d'offrandes faites par les pèlerins. Le saké est utilisé dans les différents rituels journaliers pour honorer le kami (divinité). Ca, ça me rappelle une aventure vécue voici quelques années lors d'un voyage en Côte d'Ivoire. Peut-être aurai-je l'occasion de vous la raconter un jour...

Un peu plus loin, deux étangs bordent chaque côté de l'allée principale. Ils datent tous les deux de 1182 mais leur nom commun, Genpei-ike, ne date que du début du XXè siècle. Ils représentent les deux clans rivaux qui se font face, les Taira et les Minamoto.

Les dépendances du sanctuaireLes dépendances du sanctuaire
Les dépendances du sanctuaireLes dépendances du sanctuaire

Les dépendances du sanctuaire

Nous arrivons enfin à l'entrée principale du temple symbolisée par un immense torii rouge.

Nous continuons ensuite notre chemin par une allée bordée de cerisiers et d'azalées qui court jusqu'à hauteur de la gare de Kamakura. Au printemps, la végétation forme un véritable tunnel de fleurs qui conduit jusqu'au sanctuaire.

L'initiative de cette allée de près d'un kilomètre de long revient à Yoritomo, shogun de 1192 à 1199. Il voulait que sa femme Masako ait une grossesse heureuse et fit donc planter tous ces cerisiers pour honorer le kami. Encore aujourd'hui, on peut voir des Japonaises venir avec leur bébé de 7 jours demander santé et prospérité pour leur progéniture.

Le torii de l'entrée principale et l'allée venant de la gare de KamakuraLe torii de l'entrée principale et l'allée venant de la gare de Kamakura

Le torii de l'entrée principale et l'allée venant de la gare de Kamakura

Le temple Hasedera

Près de trois kilomètres séparent le sanctuaire Tsurugaoka Hachiman-gu du temple Hasedera. Nous parcourons la moitié du chemin à pied puis, la fatigue commençant à se faire sentir, nous décidons de prendre le bus. Il est passé quinze heures quand nous arrivons au temple. Le soleil se couchant dans un peu plus d'heure, nous savons d'ores et déjà que nous ne pourrons pas visiter le dernier temple prévu au programme.

Avant de passer à la visite, voici l'histoire du temple Hasedera. La légende dit qu'en l'an 721 de notre ère le moine Tokudo Shonin découvrit un grand tronc de camphrier sacré près du village de Hase, dans la région de Nara. Il demanda à deux sculpteurs d'en réaliser deux statues de la Kannon à onze têtes. Kannon est aussi un Bodhisattva (si vous ne vous rappelez pas ce que c'est, retournez voir au Kencho-ji). On l'invoque comme protectrice dans la vie quotidienne, particulièrement pour les enfants et les marins. Elle est aussi la libératrice spirituelle des trépassés ou des âmes égarées.

Mais qu'advint-il de ces deux statues ? Celle qui fut sculptée dans la partie basse du tronc fut consacrée au temple Hasedera de Nara. L'autre, issue de la moitié supérieure, fut jetée dans la mer avec une prière disant qu'elle réapparaîtrait pour sauver le peuple.

Quinze ans plus tard, dans la nuit du 18 juin 736, elle s'échoua tout en émettant des rayons de lumière sur la plage de Nagai, sur la péninsule de Miura, non loin de Kamakura. Elle fut alors amenée à Kamakura où un temple fut construit pour l'honorer.

Lorsque nous passons la porte principale du temple, nous débouchons d'abord dans un petit jardin zen.

Le jardin zenLe jardin zen
Le jardin zenLe jardin zen
Le jardin zenLe jardin zen
Le jardin zenLe jardin zen

Le jardin zen

Le chemin central s'élève sur le flanc de la colline et nous arrivons bientôt au Jizo-do hall. Vous vous rappelez de Jizo, le protecteur des enfants ? Ici les croyants viennent prier pour faciliter une naissance, ou souhaiter la prospérité à leur enfant. Le petit temple est entouré de milliers de petites statues de Jizo, offertes pour réconforter les âmes des enfants maltraités ou décédés. C'est émouvant...

Le Jizo-do hall et les milliers de Jizo
Le Jizo-do hall et les milliers de JizoLe Jizo-do hall et les milliers de JizoLe Jizo-do hall et les milliers de Jizo
Le Jizo-do hall et les milliers de JizoLe Jizo-do hall et les milliers de Jizo

Le Jizo-do hall et les milliers de Jizo

On grimpe un peu plus haut sur la colline pour arriver sur une esplanade où se situent les principaux bâtiments du temple. Le plus important est le Kannon-do hall qui abrite la fameuse statue de la Kannon à onze têtes. Avec sa hauteur de 9,18 mètres, elle serait une des plus grandes statues de Bouddha en bois au Japon.

La Kannon a onze têtes en possède douze, en fait ! En plus de sa tête principale, elle en a trois sur le front, trois sur la droite comme sur la gauche, une sur le sommet de sa tête, et enfin une derrière. Chaque figure à sa propre expression, signifiant que la Kannon entend les souhaits de tout le monde et les éloigne de la détresse. Elle représente la compassion, la miséricorde et l'amour. Les photos sont interdites.

A la droite du Kannon-do hall se trouve le Amida-do hall. La statue d'Amida, que vous pouvez voir dans nos photos ci-dessous, mesure 2,8 mètres sans tenir compte du halo. A l'origine, elle était placée dans un autre temple qui n'existe plus aujourd'hui. Selon la légende, elle aurait été commandée en 1194 par Minamoto no Yoritomo pour se préserver du diable. Plus tard, les gens crurent qu'elle chasserait les mauvais esprits et protégerait contre la mauvaise fortune.

Le Kannon-do hall et les bâtiments environnants
Le Kannon-do hall et les bâtiments environnantsLe Kannon-do hall et les bâtiments environnants
Le Kannon-do hall et les bâtiments environnants

Le Kannon-do hall et les bâtiments environnants

A la gauche du Kannon-do hall, au fond de l'esplanade, un petit bâtiment abrite les écritures bouddhiques. C'est le Kyozo. On y trouve dix-huit moulins à prières et une étagère tournante appelée Rinzo. La croyance veut que si on tourne une fois le Rinzo, on reçoit la même vertu que si on récitait l'entièreté des écritures bouddhiques. Mais voilà, en dehors des 1 au 3 janvier, du 8 avril et du 10 août, celui-ci ne peut être tourné que le 18 de chaque mois !

Le Kyozo et ses environsLe Kyozo et ses environs
Le Kyozo et ses environs
Le Kyozo et ses environsLe Kyozo et ses environs

Le Kyozo et ses environs

Nous contournons le Kyozo par la droite et continuons à grimper à flanc de colline par un petit sentier pour déboucher dans un autre jardin. Au mois de juin y fleurissent quarante variétés d'hortensias ! Pour notre part, nous nous contenterons d'une belle vue sur Kamakura et la baie de Sagami.

Le jardin des hortensiasLe jardin des hortensias
Le jardin des hortensiasLe jardin des hortensias

Le jardin des hortensias

Nous redescendons toute la colline jusqu'au niveau du jardin zen et nous dirigeons alors vers la grotte Benten-kutsu. On y découvre les statues de la déesse Benzaiten (voir Engaku-ji) et de ses seize disciples sculptées dans la paroi rocheuse.

De petites statues appelées Hono Benzaiten peuvent être déposées dans la dernière chambre de la grotte en guise d'offrande. On peut y inscrire un vœu et son nom.

La grotte Benten-kutsuLa grotte Benten-kutsu
La grotte Benten-kutsuLa grotte Benten-kutsu

La grotte Benten-kutsu

Comme pressenti, nous n'aurons pas le temps de visiter le quatrième temple prévu au programme. Celui de demain étant moins chargé, nous décidons alors de commencer la journée par la visite de ce temple.

Nous reprenons donc le bus jusqu'à la gare principale de Kamakura, et ensuite le train JR jusque Fujisawa. Evidemment, à cette heure-ci, il ne faut pas espérer avoir une place assise dans le train !

A cette heure, le train est bondé

A cette heure, le train est bondé

Bilan de la journée : si nous sommes restés un peu sur notre faim au sanctuaire Tsurugaoka Hachiman-gu, les trois temples valaient vraiment la peine d'être visités, chacun présentant des aspects différents. Toutefois, si on devait le refaire (ce qui n'arrivera pas), on organiserait la visite en sens inverse. En commençant par Hasedera et en terminant par Engaku-ji, donc. Sachez toutefois qu'il y a bien d'autres choses à voir et à faire à Kamakura et qu'on peut envisager y rester deux ou trois jours.

Voilà. Avant de vous quitter pour cette fois, je voudrais encore vous montrer quelque-chose de vraiment sympa. Je ne me rappelle pas en avoir vu à Tokyo ou à Nikko, mais à Fujisawa, quand vous allez au restaurant, chacun a à sa disposition un panier dans lequel il peut ranger ses affaires ! Sympa, non ?

Au restaurant, un panier pour y ranger ses affaires

Au restaurant, un panier pour y ranger ses affaires

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Comment ça curiosité féminine ? Pas du tout... juste totalement connectée au moment présent... (surtout quand je ne joue pas à Pokemon ;-) )
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